LE FEDERALISME FISCAL

Australie, Canada, Etats-Unis, Inde

Les aspects fiscaux du droit budgétaire

Arvind Ashta

Copyright : Arvind Ashta, 1997

INTRODUCTION

CHAPITRE I  : LE FEDERALISME

Comme les quatre pays suivent des modèles politiques différents du fédéralisme, nous rechercherons dans un premier temps une définition du fédéralisme (Section I). Considérant que les fédérations sont dynamiques, qu'elles se divisent et se forment, nous rechercherons dans un deuxième temps les caractères du dynamisme qui découlent de la conception du fédéralisme (Section II).

  1. La définition du fédéralisme

Pour arriver à une définition du sujet, il faut d'abord examiner le sens du mot (§1). Observant qu'il y a d'autres groupements d'Etats (§2) qui montrent des caractères similaires au fédéralisme, nous essayerons de distinguer celui-ci des notions voisines pour éclaircir davantage la notion.

    1. §Le sens du fédéralisme

"Le mot n'appartient pas au vocabulaire de la pensée politique de l'antiquité grecque. Pourtant, les Ligues des cités sont les premières expériences connues en cette matière. Elles constituent des associations reposant sur le foedus (racine du mot fédéralisme), un contrat entre des cités indépendantes pour atteindre des buts communs, avec des institutions communes, en matière diplomatique, militaire, commerciale et même sportive (les J.O.  !). Cette forme d'association existait aussi dans les sociétés primitives. Celles-ci reposaient sur des liens du sang entre gens, phratrie, tribu, mais l'organisation de l'ensemble était de type fédératif. Ainsi, la Ligue des cinq nations iroquoises, en Amérique du Nord, reposait sur des droits et devoirs réciproques entre associés dans divers domaines (...) De même, dans un contexte très différent, la Première Ligue Suisse de 1235, une des origines de la Confédération helvétique actuelle, associait les trois cantons primitifs dans un but de paix interne et de défense envers les Habsbourg. (...) Mais, c'est avec la révolution américaine que commence l'histoire moderne du fédéralisme. La rupture avec la tradition s'inscrit dès le préambule de la déclaration d'indépendance "nous le peuple des Etats-Unis" (...) Comme le souligne en son temps de Tocqueville, les sujets de l'union ne sont pas des Etats mais des citoyens privés. Des citoyens qui appartiennent ainsi à deux communautés (...)"(4)

Selon le Larousse pluri dictionnaire, "une fédération (lat. foederatio, alliance) est un groupement d'Etats - succédant souvent à une confédération- qui constitue une unité internationale distincte, superposée aux Etats membres (c'est au gouvernement fédéral qu'appartient notamment la souveraineté externe [= la conduite des affaires étrangères])." Ce dictionnaire définit le fédéralisme comme "un système politique dans lequel plusieurs Etats indépendants abandonnent chacun une part de leur souveraineté au profit d'une autorité supérieure".

Le Grand Larousse donne des renseignements supplémentaires. " Fédéral - 2. Se dit d'un Etat composé de plusieurs collectivités politiques (Etats fédérés), auxquelles il se superpose" et " Fédéralisme - 1. Mode de regroupement de collectivités politiques tendant à accroître leur solidarité tout en préservant leur particularisme. 2. Fédéralisme international - association d'Etats indépendants, déléguant certaines compétences à des organes communs statuant généralement à l'unanimité (confédération d'Etats). Fédéralisme interne - fédération ou Etat fédéral coiffant des Etats membres."

Le Robert : dictionnaire de la langue française ajoute des éléments : " Fédéral - Se dit d'un Etat dans lequel les diverses compétences constitutionnelles sont partagées entre un gouvernement central et les collectivités locales qui forment cet Etat." " Fédéralisme - 1. Système politique dans lequel le gouvernement central d'un Etat (gouvernement fédéral) partage avec des groupements des collectivités qui forment cet Etat (Etats particuliers ou Etats membres) les diverses compétences constitutionnelles  : législation, juridiction et administration. Dans le fédéralisme, le gouvernement central se réserve l'exercice exclusif des compétences d'ordre international. Fédéralisme par agrégation ou association - système fédéral formé par la réunion d'Etats qui se soumettent à une autorité supérieure. Fédéralisme par ségrégation - produit par la dissociation d'un Etat antérieurement unitaire."

Selon l'Oxford Advanced Learner's Dictionary of Current English, "une fédération est un système politique dans lequel un groupement d'Etats laisse les affaires étrangères, la défense, etc. au gouvernement central (fédéral) mais ils (les Etats) retiennent des pouvoirs gouvernementaux dans quelques domaines internes."

Selon le Lexique des termes juridiques, le fédéralisme est un "mode de groupement structurel des collectivités politiques qui vise à renforcer leur solidarité tout en respectant leur particularisme. Le fédéralisme implique l'autonomie politique des collectivités membres (qui ont une organisation étatique complète) et leur participation à la constitution d'organes communs dotés de compétences plus ou moins étendues selon le degré d'intégration du groupement. 1Fédéralisme international - celui qui tend à associer les Etats dans des communautés plus vastes et se présente ainsi comme un mode d'organisation de la société internationale. 2Fédéralisme interne - celui qui vise à conférer une organisation politique aux cadres intermédiaires d'un Etat (régions, provinces...) et se présente donc comme un procédé de décentralisation poussée." Selon le même lexique, l'Etat fédéral est un "Etat composé de plusieurs collectivités politiques auxquelles il se superpose. Il s'agit donc d'un Etat "à double étage". La constitution fédérale répartit les compétences entre l'Etat fédéral et les Etats membres (en réservant généralement à l'Etat fédéral le monopole des affaires étrangères), mais les Etats membres ont la garantie d'une participation aux décisions fédérales grâce à l'organisation particulière du pouvoir législatif fédéral, qui comporte une chambre des Etats à côté de la chambre de la population."

Selon Claude-Albert Colliard(5), le fédéralisme peut être défini, "de la manière la plus large, comme un processus d'association de communautés humaines distinctes aboutissant à concilier deux tendances contradictoires  : la tendance à l'autonomie des collectivités composantes, la tendance à l'organisation hiérarchisée d'une communauté globale groupant l'ensemble des collectivités élémentaires."

Avant de discuter la nature du fédéralisme qui découle de ces définitions, nous traiterons des autres formes de groupements d'Etats.

    1. §Les autres groupements d'Etats

Selon Kelsen, "tout ordre juridique est composé de deux catégories de normes : des normes dites "centrales", qui valent pour la totalité du territoire servant d'assise à l'ordre juridique, et des normes dites "locales" ou "partielles" dont la "sphère de validité spatiale" est seulement une partie du territoire".(6) Ce sont les normes centrales qui assurent l'unité de territoire. "Le degré de centralisation ou de décentralisation d'un ordre peut varier selon une échelle continue"(7).

Tous les concepts voisins de l'Etat fédéral sont fondés, en effet, sur le degré et la forme de souveraineté transférée au gouvernement central. D'une manière linéaire, les formes d'Etats peuvent être représentées de la façon suivante(8) :

------------ -------------- -------------- ---------------- ---------------

Etats Zone de Union Union Confédé- Fédération

unitaire libre douanière économique ration

échange

Selon M. Leben, dans le fédéralisme, la souverainté internationale est totalement transférée au groupement central. C'est-à-dire que "les Etats membres ne sont plus souverains au sens du droit international".(9) Par cette définition, le rôle et les droits des missions des Etats américains à l'étranger pour attirer le tourisme et les investissements, ainsi que les missions des Etats australiens et celles du Québec, sont réduites à néant, sauf si on ne peut plus considérer les Etats-Unis, le Canada et l'Australie comme des fédérations! Or, les autres caractères de ces pays montrent clairement qu'ils en sont. C'est pourquoi nous sommes moins catégoriques dans notre définition.

L'Etat unitaire est un "Etat comportant un centre unique d'impulsion politique auquel la population est uniformément soumise sur tout le territoire, les circonscriptions territoriales ne jouissant d'aucune autonomie politique."(10)

Il y a une Union d'Etats lorsque plusieurs Etats distincts et dotés de la plénitude de leur puissance forment pourtant, au sein de la société internationale, un groupement plus stable et plus intense que celui que réalise le jeu ordinaire des relations inter-étatiques - et notamment les accords habituels - mais sans pour autant constituer un nouvel Etat.(11)

Une Zone de libre échange est une zone comprenant le territoire de plusieurs Etats, qui ont supprimé entre eux les barrières douanières mais ont conservé chacun la liberté de leur tarif douanier vis-à-vis des pays tiers (à la différence de l'Union douanière, qui comporte un tarif extérieur commun). Un traité du 22 juillet 1972 établit une zone de libre échange pour les produits industriels entre la CEE et les pays de l'Association Européenne de Libre Echange(12).

L'Union douanière est une union d'Etats ayant convenu de supprimer entre eux les barrières douanières pour ne former qu'un seul territoire douanier, et d'établir vis-à-vis des Etats tiers un tarif extérieur commun(13).

L'Union économique est un groupement d'Etats ayant convenu d'unifier leurs politiques économiques en les soumettant à des institutions et à une législation commune(14).

Une Confédération est une association d'Etats indépendants ayant, par traité, délégué l'exercice de certaines compétences (diplomatie, défense...) à des organes communs, sans constituer cependant un nouvel Etat superposé aux Etats membres (différence fondamentale avec l'Etat fédéral)(15). Les compétences confédérales sont exercées par un organe de type diplomatique, qui prend à l'unanimité ou à une majorité renforcée des décisions qui ne peuvent atteindre la population qu'indirectement, par l'intermédiaire des Etats confédérés [par exemple, la Confédération des Etats-Unis (1781-1787), la Confédération germanique (1815-1866)].

"Les sujets d'une confédération sont des Etats et non des citoyens et les décisions ne concernent ces derniers que par les mesures d'application prises par les Etats souverains."(16)

La Décentralisation est un système d'administration consistant à permettre à une collectivité humaine (décentralisation territoriale) ou à un service (décentralisation technique) de s'administrer eux-mêmes sous le contrôle de l'Etat, en les dotant de la personnalité juridique, d'autorités propres et de ressources(17).

Dans une fédération, si le gouvernement fédéral centralise excessivement le contrôle, les Etats fédérés étant laissés avec les seuls pouvoirs délégués, la forme peut devenir similaire à celle d'un Etat unitaire décentralisé.

Ainsi, une fédération fortement centralisée ressemble à un Etat unitaire fortement décentralisé dans le sens où le gouvernement fédéral a usurpé toute l'autonomie des Etats fédérés. Donc, au lieu de la représentation linéaire présentée ci-dessus, une représentation sous forme de cercle peut être plus exacte(18).

Etats Zone Union Union Confédé- Fédéra-

unitaires-----> de libre-----> douanière----->économique------>ration----->tion

l échange l

l l

l---<----------------------Etat unitaire décentralisé--<--------------------------l

Le caractère distinguant un Etat décentralisé d'une fédération est lié à la notion de souveraineté transférée. Dans les Etats unitaires décentralisés, les collectivités reçoivent par délégation une part de la souveraineté reposant exclusivement sur l'Etat unitaire. Ceci même si les collectivités sont administrées par les représentants élus parce que ces représentants sont élus seulement pour assumer les responsabilités déléguées par l'Etat. Ils n'ont pas le pouvoir de décider de leur propres fonctions. En revanche, les Etats fédérés trouvent leur légitimité dans la souveraineté populaire, c'est-à-dire que les représentants sont élus par le peuple pour assumer les fonctions décidées par le peuple.

Stéphane Rials(19) observe : "quant aux fonctions étatiques, il est assuré que les collectivités décentralisées sont bornées à l'exercice très partiel de la fonction exécutive, de la fonction réglementaire et de la fonction administrative discrétionnaire. Les collectivités fédérées exercent au surplus, à titre certes partiel et subordonné, l'ensemble des fonctions étatiques ordinaires : fonction constituante, fonction législative, fonction gouvernementale, voire, de façon exceptionnelle et marginale, fonction "fédérative" consistant à passer des accords internationaux."

Ayant signalé que la forme d'un Etat est dynamique et que la forme de l'association dépend des buts recherchés, nous examinerons les caractères qui déterminent la permanence et la dissolution des fédérations.

  1. Les caractères du fédéralisme

G. Scelle a dégagé un des principes du fédéralisme : le principe de l'autonomie. Il a aussi trouvé une superposition du niveau fédéral par rapport aux niveaux infra-nationaux. Le Fur a formulé le principe de la participation(20).

Selon Louis Delbez(21), "sur le plan juridique, l'Etat fédéral réalise cette conciliation qu'il recherche entre l'unité et la liberté par le jeu des deux principes qui sont à la base de tout fédéralisme, la loi de participation et la loi d'autonomie. D'après la première, les collectivités associées doivent collaborer à la formation des décisions prises par les autorités fédérales. La seconde loi exige que les Etats associés conservent leur liberté pour tout ce qui concerne leur organisation intérieure".

Mais dans un sens plus large, la différenciation (§1) souhaitée par les collectivités n'est pas seulement un désir de se gouverner de façon autonome, c'est aussi un désir d'affirmation de leur individualité. Aussi, la volonté d'intégration (§2) n'est pas seulement un simple désir de participation, c'est aussi une aspiration à s'identifier à un corps plus grand, exprimée par un instinct d'harmonisation. Et une fois la fédération formée, il y a un corps qui veut assurer sa propre continuation.

    1. §La différenciation des Etats fédérés

Le processus de différenciation dans un Etat fédéral a deux aspects : la séparation des Etats fédérés (A.) et leur autonomie (B.).

      1. La séparation des Etats fédérés

Alors que la séparation des Etats fédérés a pour but d'exprimer leur individualité (1), c'est la division des pouvoirs (2) entre le niveau fédéral et le niveau étatique qui maintient cette individualité.

        1. L'individualité des Etats fédérés


Les Etats fédérés expriment leur individualité en cherchant à se distinguer premièrement de l'Etat fédéral, deuxièmement entre eux, troisièmement des autres territoires de même niveau et quatrièmement des unités inférieures.

La raison pour laquelle les unités ou communautés souhaitent se séparer des communautés voisines et des groupements plus larges auxquelles elles appartiennent est la volonté de montrer leur individualité en termes sociologiques. A la base, il y a un désir de se différencier des personnes qui sont géographiquement éloignées et culturellement différentes. C'est pourquoi Georges Scelle(22) remarque que les fédérations sont formées soit par agrégation, soit par ségrégation : à la base, il y a des distinctions entre des unités. Ainsi, les résidents manifestent une double nationalité, une en tant que Californiens (par exemple) et une autre en tant qu'Américains. Ces divergences peuvent être plus importantes quand les différences ethniques ou culturelles dans des Etats multi-culturels sont fortes, comme en Inde. Ainsi, par exemple, un Pendjabi est un Pendjabi aux yeux des autres Indiens, alors que pour les nationaux des autres pays, il n'est qu'Indien.

La distinction entre les Etats fédérés est maintenue par des limites géographiques fixes et des populations spécifiques à chaque Etat. Il y a une libre circulation des personnes, mais il peut y avoir, comme dans certains Etats en Inde, des obligations imposées aux employeurs d'embaucher un pourcentage minimum de leurs salariés parmi des résidents de l'Etat fédéré. La distinction est renforcée par des cultures, des langues, des histoires, des institutions ou des lois différentes.

Le tout est plus que la somme de ses parties et l'Etat fédéral est plus que la somme des Etats fédérés. Et ceci parce qu'en dehors des Etats fédérés, il y a aussi d'autres unités ou collectivités qui appartiennent à l'Etat fédéral qui ne sont pas des Etats au sens strict. Ces territoires sont soit le siège du gouvernement fédéral [par exemple Washington (DC), Canberra (Australian Commonwealth territory), Delhi], soit des territoires ayant besoin d'un fort développement économique (par exemple Puerto Rico lié aux Etats-Unis, ou le Yukon et les Territoires du Nord au Canada), soit d'autres territoires qui, étant politiquement sensibles, ont besoin d'un contrôle direct par le gouvernement fédéral [par exemple en Inde : Pondicherry (ancienne colonie française), Daman & Diu (anciennes colonies portugaises) et Chandigarh (la capitale de deux Etats qui se disputent son contrôle)].

Chaque Etat fédéré peut avoir sa constitution unique, fédérale ou unitaire. Donc, il peut y avoir à l'intérieur d'un Etat fédéré des régions, comtés, départements, grandes villes, villages, etc. qui peuvent être aussi des unités plus ou moins autonomes/distinctes. Cependant, elles diffèrent des Etats fédérés car elles ne participent pas au niveau fédéral d'une manière formelle, mais d'une manière informelle. Le pouvoir de "lobbying" du "National League of Cities" aux Etats-Unis ou d'institutions semblables ailleurs peut donner lieu à une participation de facto aussi importante que celle des petits Etats fédérés. Cependant, des études sur le fédéralisme ignorent ces niveaux inférieurs aux Etats fédérés.

        1. La séparation des pouvoirs

Un groupement des communautés individuelles distinctes n'est pas seulement l'expression du fédéralisme, puisque celles-ci peuvent même se retrouver dans des Etats unitaires. Le fédéralisme se distingue de plus par une séparation des pouvoirs entre au moins deux niveaux - le niveau fédéral et le niveau étatique. Cette séparation du pouvoir présente deux avantages majeurs. Premièrement, la décentralisation, dans le sens où des peuples différents peuvent avoir des lois conformes à leur culture spécifique. Deuxièmement, comme le système des "checks and balances" créé par une division classique des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, le fédéralisme permet aussi une dilution des pouvoirs, évitant ainsi une concentration dans les mains d'un seul gouvernement central.

Cette séparation des pouvoirs est normalement formelle, encadrée par une constitution écrite. Bien qu'une constitution écrite éclaircisse et délimite le partage des rôles, l'interprétation juridique a cependant donné la flexibilité nécessaire pour faciliter le développement technologique, économique, politique et social au cours du temps.

          1. Le rôle de la constitution

Les pouvoirs des deux niveaux principaux sont définis par la constitution fédérale. Ainsi, certaines constitutions (Etats-Unis, Australie) énumèrent les pouvoirs centraux (les compétences d'attribution) et laissent tous les autres pouvoirs aux Etats fédérés (les compétences de principe). D'autres peuvent faire l'inverse, c'est-à-dire énumérer les pouvoirs des Etats fédérés (les compétences d'attribution) et laisser les pouvoirs résiduels au gouvernement fédéral (les compétences de principe). Il y a aussi des constitutions qui dressent une liste détaillée des pouvoirs exclusifs de chaque niveau de gouvernement, et qui soit laissent le reste du domaine législatif (sans détailler) aux pouvoirs concurrents avec une suprématie fédérale (Canada), soit spécifient même les pouvoirs du domaine concurrent (Inde) avec le pouvoir résiduel donné au gouvernement fédéral. En effet, dans le domaine concurrentiel, les gouvernements étatiques n'ont qu'une compétence d'exception.

Les normes du fédéralisme sont énumérées dans un rapport de l'ACIR suivant le cas du Garcia(23) :

"La constitution doit déléguer le pouvoir du peuple souverain aux deux (ou plus) gouvernements pour lesquels l'étendue de l'autorité de chacun est contenue dans un cercle limité et l'exercice de l'autorité dans ce cercle limité est de plus limité par des interdictions explicites.

Chacun des gouvernements doit avoir l'autorité sur une partie commune des citoyens.

Chacun doit avoir des pouvoirs importants qui sont exercés indépendamment d'autres gouvernements et doit avoir aussi certains pouvoirs concurrents.

Chacun doit être libre sauf si ses actions ont un conflit avec les actions du gouvernement supérieur ou de la constitution.

La Constitution doit faire une distinction corrélative (c'est-à-dire énumérer le partage des pouvoirs) des pouvoirs de chaque niveau du gouvernement et elle doit créer une gamme des règles décisionnelles pour résoudre les conflits si l'exercice d'autorité par les différents gouvernements crée les incompatibilités dans un but de préserver les pouvoirs indépendants et concourants de chaque niveau du gouvernement dans le système".

La Constitution australienne qui s'appelle "The Commonwealth of Australia Constitution Act" est contenue dans une loi britannique. Pourquoi britannique? Parce qu'en 1900, le Parlement britannique était le seul corps qui avait des pouvoirs sur toute l'Australie. Le droit constitutionnel australien inclut, en outre, "The Statute of Westminster Adoption Act, 1942" et "The Australia Act, 1986".

L'article 51 de la Constitution australienne détaille les pouvoirs législatifs du gouvernement fédéral. En 1900, les Etats, désormais fédérés, ont gardé les pleins pouvoirs sur tous les domaines. Donc, le droit étatique est valide à moins que le Commonwealth ne superpose sa législation (Art. 109). Donc, les pouvoirs fédéraux sont en effet concurrents(24) et non pas exclusifs. Les seules interdictions aux législatures(25) étatiques sont spécifiées dans le Chapitre V (Articles 114 et 115); notamment le monnayage, l'établissement de forces militaires, et la taxation de la propriété fédérale.

La clause xxxix de l'article 51 donne au gouvernement du Commonwealth le pouvoir de légiférer sur les matières relatives à l'exécution d'un pouvoir constitutionnel du parlement, ou à une de ses chambres, ou au gouvernement du Commonwealth, ou à la judicature fédérale, ou à un département ou un officier du Commonwealth. Donc, il y a une possibilité d'élargir le pouvoir fédéral, même si le pouvoir législatif résiduel reste aux Etats fédérés.

Depuis 1982, la Constitution du Canada comprend  :

- la loi sur le Canada de 1982, y compris la loi constitutionnelle de 1982 qui contient entre autres la Charte canadienne des droits et libertés;

- 24 textes législatifs ou décrets figurant dans l'Annexe I de la loi constitutionnelle de 1982 parmi lesquels on trouve la loi constitutionnelle de 1867 (autrefois l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, 1867), 12 autres lois constitutionnelles votées entre 1871 et 1975 (autrefois appelées Actes de l'Amérique du Nord britannique), 8 lois ou décrets sur les conditions de l'adhésion des Provinces ou des territoires à la Confédération du Canada, la loi de 1875 sur le Parlement du Canada, la loi de 1889 sur le Canada (frontières de l'Ontario), et le Statut de Westminster de 1931; et

- les modifications de ces textes législatifs et de ces décrets.

La distribution des pouvoirs législatifs est détaillée dans les articles 91 à 95 de la loi constitutionnelle de 1867.

L'article 91 permet au gouvernement canadien de légiférer sur les matières qui y sont spécifiées. La dernière clause, après le sous-article 29 dispose :

"Et aucune des matières énoncées dans les catégories de sujets énumérés dans le présent article ne sera réputée tomber dans la catégorie des matières d'une nature locale ou privée comprises dans l'énumération des catégories de sujets exclusivement assignés par la présente loi aux législatures des provinces."

L'article 92 détaille les sujets de compétence exclusive de la législation provinciale.

La Constitution canadienne, ainsi que la Constitution américaine, n'a pas énuméré explicitement les pouvoirs concurrents.

L'indépendance des Etats-Unis a eu lieu en 1776. Sa Constitution fédérale (à partir de 1787) a suivi onze ans d'un régime confédéral (1776-87).

La relation législative entre le gouvernement fédéral et les Etats fédérés est détaillée par l'article Ier, sections 8 et 10 et par le dixième amendement de la Constitution. La section 8 de l'art.1 détaille les pouvoirs du Congrès; et la section 10 de cet art.1 dénie la plupart de ces pouvoirs aux Etats fédérés.

La dernière clause de la section 8 de l'art.1 donne au gouvernement fédéral le pouvoir

"de faire toutes les lois nécessaires à la mise en oeuvre des attributions ci-dessus énoncées et de celles conférées au Gouvernement des Etats-Unis, à ses administrations ou à ses agents par la présente Constitution."(26)

Alors, cette clause permet toute législation attachée aux pouvoirs énumérés.

La Constitution indienne a été promulguée en 1949, après l'indépendance indienne obtenue en 1947, à la différence de l'Australie et du Canada qui ont eu l'indépendance de jure après l'indépendance de facto qui suivait leur Constitution originelle.

La distribution des pouvoirs législatifs est contenue dans le chapitre Ier de la partie XI de la Constitution (les articles 245 à 255). La clause 246 est celle qui divise les matières en trois Listes, contenues dans l'Annexe VII de la Constitution. La Liste I (reconnue comme la Liste de l'Union) contient 97 inscriptions détaillant les sujets relevant de la compétence exclusive du gouvernement fédéral. La Liste II (reconnue comme la Liste des Etats) contient 66 inscriptions détaillant les sujets relevant de la compétence exclusive des gouvernements étatiques, et la liste III (reconnue comme la Liste concurrent) contient 47 inscriptions de matières sur lesquelles l'Union et les Etats fédérés, tous deux, peuvent légiférer.

La clause résiduelle est répétée. Elle est contenue dans la dernière inscription de la Liste de l'Union (inscription 97) ainsi que dans l'article 248. Autant cette inscription que cet article spécifient que toute matière, y compris l'impôt, non couverte par les Listes II et III, sera du domaine législatif exclusif du gouvernement fédéral.

Le pouvoir résiduel est un pouvoir qui donne au gouvernement fédéral ou au gouvernement étatique le pouvoir de légiférer sur tout sujet qui n'est pas expressément conféré à l'un ou l'autre. Au fil du temps, de nouvelles matières apparaissent et c'est alors le pouvoir résiduel qui permet à un des gouvernements de s'occuper de ces nouveaux domaines. Aux Etats-Unis et en Australie, selon leurs Constitutions, le pouvoir résiduel est confié aux gouvernements étatiques. Cependant, la jurisprudence peut permettre au gouvernement fédéral de légiférer sur toute matière de portée nationale. Donc, bien que les Constitutions favorisent les Etats fédérés, la jurisprudence a plutôt permis des tendances centralisatrices.

Ainsi, aux Etats-Unis, pour éviter un élargissement inutile de l'interprétation de la clause dite "necessary & proper", le dixième amendement (fait en 1791) clarifie expressément que le pouvoir résiduel est laissé aux Etats fédérés :

"Les pouvoirs qui ne sont pas délégués aux Etats-Unis par la Constitution, ni refusés par elle aux Etats fédérés, sont réservés aux Etats fédérés ou au peuple".

Cependant, il s'agit seulement d'une clarification de ce qui est contenu dans la Constitution. L'amendement est descriptif et non pas normatif. Il n'ajoute donc rien à la Constitution. Depuis l'arrêt Garcia (1985), on constate en effet qu'il n'y a aucun pouvoir expressément réservé aux Etats fédérés par une disposition constitutionnelle. Une interprétation large de la clause "necessary & proper" peut alors réduire le domaine réservé aux Etats fédérés à néant. En effet, les Cours ont pris en compte l'objectif poursuivi par la législation et s'il a un quelconque rapport avec les préoccupations nationales, les Cours ont permis au gouvernement fédéral de légiférer. Finalement, dans Garcia, la Cour a abdiqué son rôle de détermination du pouvoir étatique en le laissant au processus politique.(27)

En Inde et au Canada, la Constitution donne le pouvoir résiduel au gouvernement central. Leurs Constitutions ont clairement intensifié ce penchant pour la centralisation au fil du temps et des évolutions.

En effet, si le pouvoir résiduel est laissé entre les mains d'un des niveaux de gouvernement, il est inutile d'énumérer les pouvoirs de ce niveau de gouvernement, sauf à titre d'exemple(28). Par conséquent, l'énumération des pouvoirs fédéraux dans l'article 91 de la Constitution canadienne ou dans la Liste I de la Constitution indienne est redondante. Il aurait suffit que les pouvoirs étatiques et concurrents soient énumérés. On en déduit alors que tous les autres pouvoirs restent au gouvernement fédéral.

La clause de domination fédérale : Quand il y a deux législations concurrentes, toutes deux valides constitutionnellement, qui sont néanmoins incompatibles, l'une doit s'effacer devant l'autre. Dans les fédérations, la législation fédérale est considérée comme dominante sauf si elle est ultra vires.

En Australie, c'est l'article 109 de la Constitution qui dispose que

"Quand une loi d'un Etat est incompatible avec une loi du Commonwealth, c'est la dernière qui va prévaloir et la première sera invalide au fur et mesure de l'incompatibilité".

Au Canada, c'est l'article 52, première clause, qui stipule que

"la Constitution du Canada est la loi suprême du Canada; elle rend inopérante les dispositions incompatibles de toute autre règle de droit".

Aux Etats-Unis, la clause de suprématie (Article VI, clause 2) a été élargie par diverses doctrines, c'est-à-dire que la loi fédérale avait la suprématie sur les lois étatiques tant qu'elle légiférait sur un sujet dans un domaine jugé fédéral.

En Inde, ce sont les articles 246 et 254 de la Constitution qui donnent la règle de la suprématie fédérale.

          1. Le rôle de la doctrine

Avec la croissance de la taille des unités industrielles et le besoin d'accéder aux marchés plus grands, il a été nécessaire d'harmoniser les législations au delà des frontières étatiques, et en conséquence, d'augmenter le rôle fédéral. En même temps, la grande crise économique des années trente, la guerre et la reconstruction d'après-guerre ont montré l'importance du rôle de l'Etat (fédéral) pour influer sur le niveau de l'activité économique. L'insistance keynésienne sur la "fiscal policy" (politique budgétaire) a donné aux gouvernements fédéraux une raison d'augmenter leur rôle. L'interprétation juridique a permis aux gouvernements fédéraux ce que la constitution n'avait pas permis.

Il faut rappeler que les quatre fédérations étudiées (l'Australie, le Canada, les Etats-Unis et l'Inde) sont des fédérations créées par agrégation, c'est-à-dire que les Etats sont regroupés pour former une fédération plus large. La réticence de la part des Etats à transférer leur souveraineté, et avec celle-ci leur pouvoir et leur rôle, était naturelle. En conséquence, seulement le minimum essentiel a été transféré, surtout dans les constitutions les plus anciennes. Cependant, une fois créé, le gouvernement fédéral a eu tendance à tout dévorer et à justifier son existence en grignotant l'importance des niveaux inférieurs à la souveraineté. Ce détournement se faisait avec l'aide de la Cour Suprême, contrôlée par le gouvernement fédéral, grâce à des doctrines facilitant l'expansionnisme fédéral.

Jusque dans les années 1940, la jurisprudence canadienne limitait l'étendue des pouvoirs fédéraux. Par exemple, le paragraphe introductif de la section 91 de la Constitution était interprété étroitement, étant considéré comme juste un autre pouvoir énuméré(29). Depuis, le Canada a suivi les Etats-Unis dans une période de tendances fortes à la centralisation. La guerre mondiale et le climat d'après-guerre l'y ont aidé en créant les conditions nécessaires. Dès 1971, les Canadiens étaient ainsi habitués à une Cour Suprême, qui ne déclarait ultra vires une législation fédérale que rarement(30).

Aux Etats-Unis, l'étendue des pouvoirs énumérés du gouvernement fédéral a été élargie par des théories telles que celle des pouvoirs implicites, celle des pouvoirs accessoires (ancillary powers), et la doctrine d'utilisation des pouvoirs à des fins étrangères (extraneous ends) à celles pour lesquelles ces pouvoirs ont été énumérés. De plus, un sens large a été donné à la "clause de nécessaire et propre" (necessary and proper clause). Cependant, les doctrines conservatrices persistent, telle que celle du fédéralisme dual (dual federalism), pour limiter l'élargissement incontrôlable des pouvoirs fédéraux(31).

En Inde, c'est l'inscription 52 de la Liste I (Liste de l'Union) qui donne un pouvoir très étendu au gouvernement fédéral pour légiférer sur toute matière jugée par lui comme étant d'intérêt public.

Pour donner un exemple(32), en vertu de ce pouvoir assigné au gouvernement fédéral, celui-ci a passé la loi de 1951 sur les industries, leur développement et leur régulation. En conséquence, le gouvernement fédéral peut réguler et contrôler chaque industrie à chaque phase à partir du moment où il attribue un permis industriel. Pourtant, les "industries" tombent sous l'inscription 24 de la Liste II, c'est-à-dire sous la juridiction exclusive des Etats fédérés.

La doctrine d'essence et de substance (pith and substance) est utilisée par la jurisprudence pour vérifier ce que la législation essaie de contrôler et déterminer si cette matière relève du domaine fédéral ou étatique.

      1. L'autonomie des Etats fédérés

L'autonomie est le droit de se gouverner soi-même. Selon le Larousse pluri dictionnaire,

"Autonome  : se dit d'un territoire, d'une communauté qui s'administre librement, se gouverne par ses propres lois, à l'intérieur d'une organisation plus vaste dirigée par un pouvoir central ou selon des règlements particuliers."

Dans une fédération, l'autonomie des Etats fédérés suppose que ceux-ci possèdent les éléments (1) nécessaires à l'autonomie et qu'il y ait des garanties (2) pour la bonne continuation de cette autonomie étatique.

        1. Les éléments de l'autonomie

Les éléments requis pour l'autonomie sont des institutions indépendantes nécessaires pour se gouverner, à savoir les corps législatif, exécutif et judiciaire.

Stéphane Rials(33) remarque que

"les collectivités fédérées exercent une fonction constituante subordonnée. Il s'agit d'une prérogative d'auto-organisation. Il appartient à l'Etat fédéré de se doter librement d'organes et de procédures décisionnelles propres. C'est ainsi que les Etats américains ou les Länder allemands n'ont pas les mêmes constitutions, même si la force du mimétisme tend à les uniformiser en pratique."

On observe que cette prérogative d'auto-organisation est souvent plus ou moins limitée par la constitution fédérale.

Par exemple, la Constitution des Etats-Unis insiste sur une forme républicaine de gouvernement étatique.

La collectivité fédérée exerce la fonction législative dans le domaine de sa compétence. A la différence des collectivités décentralisées qui ont une fonction législative subordonnée en général aux lois de l'Etat central (même si les membres de la législature régionale ou départementale sont élus), les lois étatiques ne sont en principe, dans le champ de leur compétence, soumises qu'à la constitution étatique. En principe, le droit fédéral supplante le droit des Etats particuliers, mais seulement dans les cas où le droit fédéral a compétence d'après la constitution fédérale(34).

Le principe d'autonomie est un élément essentiel de la notion classique de liberté individuelle, c'est-à-dire une liberté d'action tant que d'autres entités ne sont pas affectées. De même, les Etats fédérés individuels demandent et ont le pouvoir de réguler leur vie interne, tant que les affaires internationales ou inter-étatiques ne sont pas en jeu.

Ce droit d'autonomie est établi dans les institutions législatives des Etats fédérés ou des Provinces. Dans les quatre fédérations étudiées, tous les Etats ont des législatures indépendants, soit monocamérales, soit bicamérales. Ainsi, en Australie, il y bicaméralisme, sauf au Queensland depuis 1922 et aux Territoires du Nord. De même aux Etats-Unis, sauf au Nebraska (depuis 1937). En revanche, au Canada, il y a monocaméralisme, tout comme en Inde, sauf au Bihar, au Maharashtra, au Karnataka et en Uttar Pradesh.

Chaque Etat fédéré a aussi son propre exécutif avec des nomenclatures variables. En Australie, le pouvoir nominal est représenté par un Gouverneur qui est nommé par la Reine d'Angleterre, alors que le pouvoir réel demeure dans les mains du premier ministre de l'Etat fédéré et son cabinet. Au Canada, le pouvoir nominal est représenté par un Lieutenant- gouverneur, qui était autrefois nommé par la Reine d'Angleterre mais l'est désormais par le Gouverneur-général du Canada, alors que le pouvoir réel demeure dans les mains du premier ministre de la Province et son cabinet. Aux Etats-unis, le pouvoir réel et nominal appartient à un Gouverneur élu. En Inde, le pouvoir nominal est représenté par un Gouverneur nommé par le Président de la République fédérale, alors que le pouvoir réel appartient au Ministre-en-chef ("Chief Minister") de l'Etat fédéré et son cabinet. Cependant, l'action d'un Gouverneur sous la direction du parti au pouvoir au niveau fédéral peut se révéler irritante pour un gouvernement d'un parti d'opposition au niveau étatique.

La jouissance de l'autonomie ne tient pas seulement à l'existence au niveau étatique d'institutions de gouvernement, mais aussi à l'existence au niveau fédéral d'institutions qui garantissent la continuité de l'autonomie des Etats fédérés.

        1. Les garanties de l'autonomie

Dans son Destin du fédéralisme, Stéphane Rials identifie deux institutions nécessaires au niveau fédéral pour la garantie de la jouissance de l'autonomie des Etats fédérés : la constitution fédérale, qui délimite les compétences de la législation autonome des Etats fédérés par énumération de celles-ci ou par défaut; et la Cour Suprême, qui est la gardienne de la constitution fédérale et ainsi de l'autonomie fédérée. M. Colliard(35) avait déjà discerné une troisième, à savoir que c'est la participation des Etats fédérés au niveau fédéral qui est la vraie garantie de l'autonomie au niveau étatique, surtout la participation dans la préparation et la révision de la constitution fédérale, y compris l'énumération des pouvoirs de la Cour Suprême. C'est cette liberté de participation(36) qui est l'élément principal d'intégration dans une société plus grande. Ainsi, les écrits canadiens(37) marquent bien la différence entre le fédéralisme inter-étatique et le fédéralisme intra-étatique, pour exprimer plus clairement dans ce dernier la nécessité de protéger les intérêts régionaux au sein du gouvernement fédéral. De plus, la Cour Suprême américaine a depuis longtemps permis au Congrès de déterminer son propre rôle parce que les Etats fédérés y sont représentés(38).

    1. §L'intégration dans un pays fédéral


L'intégration présente deux aspects. D'un côté, les Etats veulent s'intégrer dans un Etat fédéral pour bénéficier des privilèges de la participation conjointe au niveau national (A.) et international. De l'autre côté, le gouvernement fédéral a besoin d'intégrer et de contrôler les Etats (B.) et leurs économies pour influencer l'activité économique et harmoniser l'organisation juridique facilitant le libre mouvement des capitaux et des personnes.

      1. La participation des Etats fédérés au niveau fédéral

La participation des Etats fédérés au niveau fédéral est motivée (2) par des fins surtout économiques. Pour obtenir celles-ci, les Etats fédérés participent de plusieurs manières aux institutions fédérales (1).

        1. Les modalités de la participation

Les collectivités fédérées doivent participer au sein des organes de l'Etat fédéral. Cette participation s'exerce dans le cadre du bicaméralisme fédéral, où la deuxième chambre représente les Etats fédérés. C'est surtout leur participation à la révision de la Constitution qui assure une vraie représentation.

          1. Le bicaméralisme fédéral


Le bicaméralisme fédéral n'est pas de même nature que celui que l'on observe dans les Etats unitaires, qui a surtout une vocation modératrice. C'est

"un bicaméralisme bien particulier dont la finalité est de représenter les Etats fédérés sur un pied soit d'égalité, soit d'inégalité très atténuée, les collectivités fédérées peu peuplées ayant une moindre représentation, mais pas en proportion de leur nombre d'habitants.".(39)



En Australie, chacun des six Etats originaux a un minimum de six sénateurs (Art.7 de la Constitution). Cependant, le Parlement peut déterminer le nombre actuel de sénateurs. Désormais, il y a 12 membres pour chacun des six Etats membres originaux et 2 pour chacun des deux Territoires. Ce qui fait un total de 76 membres(40).

Au Canada, la distribution des 104 sièges au Sénat est donnée à l'Annexe 1.2 (le nombre des représentants est indiqué à côté parce qu'ils changent en fonction des recensements et est ainsi révélateur de l'évolution de la population). Il apparait que l'influence de la population est considérablement atténuée au Canada en ce qui concerne la composition du Sénat.

Aux Etats-unis, les Etats ont une représentation égale au Sénat avec deux sénateurs chacun. Ce qui fait que le Sénat a 100 sénateurs représentant les 50 Etats. Alors que la participation prévue par la Constitution était celle des représentants d'Etat (Art 1, Sec 3, Cl.1), le dix-septième amendement (1913) a dilué les pouvoirs étatiques en faveur d'une élection directe par des peuples au Sénat.

En Inde, la composition du Conseil des Etats est régie par l'article 80 de la Constitution et l'Annexe IV à la Constitution. La quatrième Annexe indique le nombre de membres de chaque Etat/Territoire, alors que l'article 80 ajoute 12 membres à nommer par le Président de la République. Il y a 245 membres. La composition du Sénat (voir Annexe 1.3) varie selon les recensements, sachant que chaque Etat a au moins 1 membre, ce qui atténue très légèrement l'effet de la proportionnalité.

          1. Les pouvoirs de la Chambre haute

Les pouvoirs de la Chambre haute sont parfois différents de ceux des chambres basses. Alors qu'aux Etats-Unis, le Sénat américain jouit-il de compétences supérieures à celles de la Chambre des représentants dans certaines domaines (traités internationaux, nominations présidentielles), en Australie, au Canada et en Inde, la Chambre haute a un rôle moins important.

Pour les lois financières, la Chambre haute indienne ne peut même pas initier les lois. Pour les autres lois, elle a les mêmes pouvoirs que la Chambre basse (Articles 107 et 108) pour initier et voter les lois. Dans tous les cas, ses recommandations n'ont pas de force obligatoire (Article 109). En Australie, le cas est le même qu'en Inde (Article 53). Au Canada, la croissance du régionalisme est attribuée selon M. Patrick Monahan(41) au fait que le Sénat n'a guère d'influence, les sénateurs étant nommés par le gouvernement. Sans la participation des Provinces au niveau fédéral, il n'y a pas de garantie pour la protection des intérêts régionaux.

          1. La révision de la constitution fédérale

"Les collectivités fédérées participent en général d'une façon toute particulière à la révision de la constitution fédérale : elles interviennent à cet égard non seulement par le truchement du bicaméralisme fédéral (...) mais encore, plus directement, en étant assez souvent appelées à ratifier la révision à une majorité qualifiée".(42)

L'Article 128 de la Constitution australienne se rapporte à sa modification. Une triple majorité est nécessaire. La majorité est exigée pour les deux chambres du Parlement fédéral (al. 2). Cependant, après un délai, une majorité dans une seule chambre peut suffire (al. 3). La majorité des électeurs(43) d'une majorité d'Etats fédérés doit aussi donner son consentement à la modification (al. 4). La majorité de tous les électeurs est aussi nécessaire (al. 4).

L'Acte de l'Amérique du Nord Britannique n'avait pas établi de procédure pour sa propre modification, sauf pour certaines de ses dispositions précisant "sauf si le Parlement du Canada n'en dispose autrement". Pourquoi ? Parce que cet Acte étant une simple loi britannique, c'était le Parlement britannique (et non pas celui du Canada) qui avait le pouvoir de la modifier par une majorité simple, comme toute autre loi britannique. Après le Statut de Westminster de 1931, le Canada a été reconnu comme une république indépendante, mais toujours sans pouvoir de modifier sa propre Constitution(44). Ce n'est qu'en 1949 que le gouvernement britannique a permis au gouvernement canadien de modifier quelques aspects de sa Constitution. Le gouvernement fédéral ne pouvait pas, toutefois, modifier l'attribution des pouvoirs provinciaux(45). Ce n'est qu'en 1982 que le gouvernement canadien a eu une complète liberté pour sa propre Constitution, qu'il peut modifier sans recourir au Parlement britannique.

La procédure normale de modification de la Constitution est expliquée dans la Section 38(1) de l'Acte de 1982. Elle exige une majorité dans chaque chambre du Parlement fédéral et dans les Législatures (monocamérales) de deux tiers des Provinces ayant au moins 50% de la population canadienne(46). Cependant, pour certains sujets sensibles [Section 38 (2)], y compris l'attribution des compétences entre les niveaux fédérés(47), la modification n'est pas applicable à une Province qui exprime son désaccord [(Section 38(3)]. De plus, pour les questions encore plus importantes ou sensibles, la majorité des sénateurs, des députés et des Législatures de toutes les Provinces est nécessaire (Section 41).

Aux Etats-Unis, l'Article V de la Constitution exige une ratification par des législatures ou des conventions dans les trois quarts des Etats fédérés. Même la proposition d'amendement doit être ratifiée par les deux tiers de chaque chambre ou par des Législatures des deux tiers des Etats fédérés. Aucun Etat ne pourra, sans son accord, être privé de l'égalité de représentation au Sénat.

Pour l'Inde, c'est l'Article 368 de la Constitution qui explique la procédure de la modification. Une majorité des membres (et au moins deux tiers de ceux qui sont présents et qui votent) des deux Chambres du Parlement fédéral est nécessaire. Cependant, pour les matières sensibles (notamment l'attribution des compétences, les relations inter-gouvernementales, la représentation dans la Chambre d'Etats et le système judiciaire), au moins la moitié des législatures étatiques doivent aussi ratifier l'amendement.

        1. Les buts de la participation

Les Etats s'unissent pour présenter un front commun en face du reste du monde autant que pour exploiter les avantages d'échelles liés à une direction commune intérieure. Le front commun envers le reste du monde permet une défense commune et une augmentation du pouvoir de négociation. La défense commune a des aspects autant militaires qu'économiques.

Les avantages militaires d'une défense commune des Etats qui se regroupent pour former un Etat fédéral sont détaillés par M. John Jay dans The Federalist Papers(48). Une armée nationale coûte moins que la maintenance de "treize" armées étatiques autonomes. Les pertes de guerre entre les Etats fédérés sont évitées parce que les Etats appartenant à un seul pays n'ont pas besoin de se faire la guerre (Jay : Fed.N5). Les guerres sont souvent le résultat de la passion incontrôlée d'une minorité pour des raisons qui la concernent exclusivement. Le fédéralisme peut impliquer que la raison d'une majorité plus nombreuse puisse prévaloir sur les passions de la minorité (Jay : Fed.N3). La sélection des meilleurs hommes de plusieurs Etats forme une meilleure armée (Jay : Fed N3 et N4). Les ressources et pouvoirs du tout peuvent être utilisés pour la défense d'une partie (Jay : Fed. N4). Une nation grande peut sembler menaçante et ceci évite des attaques injustifiées de la part d'autrui (Jay : Fed.N3).

Comme la défense militaire, les Etats sont aussi engagés dans une défense de leur économie et pour celle-ci, le fédéralisme leur accorde des avantages similaires. Un pays fédéral a tous les avantages d'une Union douanière. Un tarif commun arrête les importations non désirées et ceci encourage la production domestique, notamment pour des industries naissantes. La fédération a les avantages des "zones de libre échange". A l'intérieur du pays, les biens circulent librement et les industries bénéficient des avantages de l'efficacité économique du libre-échange. La plus grande taille du marché interne par l'élimination des barrières internes permet une meilleure allocation des ressources (les travailleurs et les autres facteurs de production) entre les secteurs et les régions(49). Même les avantages des unions économiques sont retenus. Une politique économique commune peut influencer les mouvements de devises et freiner les importations. En relation avec ceci est la capacité à défendre les prix des ressources primaires. Ainsi, le Canada est mieux situé face aux Etats-Unis pour défendre la politique agricole canadienne que la Saskatchewan toute seule(50). L'instabilité régionale est réduite parce que les risques sont groupés. Ce groupement crée une assurance inter-régionale par l'échange des travailleurs et du capital en réponse à des opportunités fluctuantes. Ces risques sont surtout associés aux Provinces qui ont choisi la spécialisation(51). O. Yul Kwon considère que la Saskatchewan a tiré un tel avantage de la fédération. L'infrastructure administrative et judiciaire peut être partagée(52).

Evidement, l'influence exercée par une communauté au sein des relations internationales varie, ceteris paribus, avec sa taille. Des pays fédéraux ont, alors, une influence politique et économique plus grande.

L'influence politique est la capacité d'un pays à générer parmi les nationaux des autres pays un avis favorable envers soi-même. Un des mécanismes utilisés est l'aide économique donnée aux pays qui soutiennent une politique favorable au donneur de l'aide. Cette capacité d'aider les autres nations augmente avec le regroupement de plusieurs Etats en un seul car il cumule les spécialisations offertes pour l'aide aux autres pays.

L'Etat fédéral devenu militairement plus fort peut aussi imposer son point de vue aux autres pays, par exemple l'action des Etats-Unis sur le Nicaragua ou l'Irak.

Avec l'augmentation de taille vient aussi l'influence économique. Premièrement, une grande économie peut influencer la direction et le niveau des investissements ainsi que ceux des consommations des autres pays. Deuxièmement, le mouvement des devises internationales ainsi que celui des taux d'intérêts peuvent être influencés par une augmentation ou une diminution de la disponibilité de la monnaie nationale. Ceci permet des bénéfices cachés. On peut citer comme exemple le maintien d'un dollar faible lors de ventes d'avions pour être plus concurrentiel sur le marché international, puis d'un dollar fort favorable à la vente des pièces détachées pour récupérer les bénéfices, une fois la vente des avions réalisée. Troisièmement, dans les conflits internationaux, les pouvoirs de négociation d'un grand pays autonome sont beaucoup plus importants que ceux des petits Etats fédérés isolés (spécialisés et dépendants)(53).

L'Union d'Etats permet des économies d'échelles. Les Etats fédérés sont intéressés par l'accès au marché intérieur du pays fédéral et veulent influencer l'ouverture du marché des autres Etats associés. Ils veulent également bénéficier de la protection de la frontière nationale afin de participer plus facilement aux contrats des gouvernements des autres Etats fédérés au sein du pays. Un grand marché intérieur permet des économies d'échelle. Comme pour la défense, le choix de meilleurs dirigeants administratifs est plus vaste.

      1. Le contrôle des Etats fédérés par le niveau fédéral

Il est évident que les buts du contrôle (1) dans une fédération sont liés aux avantages offerts par le fédéralisme. Cependant, il y a aussi des impératifs de contrôle qui sont spécifiques aux fédérations. Pour atteindre ces buts, le gouvernement fédéral dispose de différentes modalités (2).

            1. Les buts du contrôle

Le gouvernement fédéral essaie perpétuellement d'harmoniser les règlements et les régulations entre ses Etats afin de faciliter son contrôle et de réaliser les buts de la fédération. Il doit aussi résoudre des problèmes d'allocation et de redistribution.

L'harmonisation est recherchée d'une part pour faciliter la libre circulation des personnes, des biens et du capital et d'autre part pour faciliter le contrôle fédéral par une harmonisation de l'information.

En ce qui concerne la libre circulation du capital, le gouvernement fédéral essaie de résoudre deux types de problèmes. Premièrement, les commerçants essaient de réduire leurs risques autant que possible et pour cela, ils ont besoin de comprendre les lois en vigueur dans les diverses régions. Une pléthore de lois à travers le pays décourage les entrepreneurs et empêche les mouvements de capitaux vers de nouvelles zones plus efficaces.Pour résoudre ce problème, le gouvernement fédéral essaie de favoriser l'harmonisation des lois à travers le pays. Deuxièmement, il peut y avoir des barrières fiscales, légales ou administratives au libre-échange. Le gouvernement fédéral essaie d'intervenir pour enlever des telles barrières.

Un développement économique efficace nécessite non seulement la libre circulation des capitaux, mais aussi la migration des travailleurs des régions de surplus aux régions de manque. En général, les salariés sont encore peu accoutumés à prendre des risques et ils se méfient de l'inconnu. Une forte motivation d'ordre pécuniaire est nécessaire pour décider les gens à rompre avec leurs liens familiaux et amicaux et à partir travailler dans un environnement inhabituel, avec ses propres lois. L'harmonisation des lois facilite alors la mobilité des migrants.

Les fédérations de l'Australie et des Etats-Unis sont stables car elles ont réussi à instiller une image nationale et à créer un modèle idéal de conduite auquel les peuples aspirent. Cette tâche a été facilitée par une culture commune à la base. En revanche, les fédérations multi-culturelles trouvent cette tâche plus difficile. Les bénéfices de la participation sont essentiellement perçus comme économiques. Le "role behaviour" a des connotations plus socio-psychologiques qu'économiques. Le gouvernement fédéral a la délicate mission de promouvoir l'acceptation et même l'appréciation de la diversité, en recherchant perpétuellement des facteurs d'unité. S'il échoue dans ce but, des failles apparaissent dans la fédération.

Pour contrôler, réguler et stimuler la fédération, le gouvernement fédéral a besoin d'informations provenant des Etats fédérés. Or, chaque Etat fédéré amasse des informations à propos de ses propres données et suit la comptabilité qui en découle. Dès lors, le gouvernement fédéral peut obtenir des renseignements divers sur une même question. Pour éviter la confusion totale, le gouvernement fédéral a besoin de déterminer clairement ses besoins d'informations et de définir de façon détaillée chaque intitulé. De plus, chaque renseignement impose un coût de recherche d'information. Donc, il faut aussi standardiser à travers le temps ce qui sera demandé régulièrement. Ceci à deux fins : premièrement pour assurer une comparaison valable inter-temporelle, et deuxièmement, pour que les Etats fédérés puissent mettre en place des systèmes de production périodique de l'information.

Le gouvernement fédéral essaie de résoudre les problèmes de l'allocation et de la distribution liés à la participation jointe de plusieurs Etats. Alors que ces problèmes sont plutôt économiques, ils tendent à s'exprimer de manière politique. Sous cet angle, les Etats fédérés recherchent une plus grande participation au niveau fédéral pour en faire bénéficier leur peuple. Le parti politique au pouvoir au niveau fédéral aura naturellement intérêt à favoriser les Etats fédérés où il a la majorité politique. Les Etats minoritaires sentent que leurs intérêts ne sont pas protégés.

En fait, ces problèmes politiques sont souvent une façade pour des problèmes de partage économique concernant soit l'allocation, soit la distribution. Pour influencer le niveau de l'activité économique dans le pays, plusieurs politiques peuvent être considérées. L'adoption de certaines stratégies économiques peut favoriser les Etats fédérés de façon différente. "La part du gâteau" que chacun reçoit varie par conséquent en fonction des politiques mises en place. Le problème de la distribution est double : premièrement, la question est de savoir qui va supporter le fardeau (qui paie?)(54) et deuxièmement, qui va en retirer les bénéfices (qui reçoit?). Pour influencer les décisions de l'Etat fédéral, tous les Etats agissent finalement comme des groupes de pression.

            1. Les modalités de contrôle

Pour atteindre les buts de l'intégration fédérale, le gouvernement fédéral a diverses modalités de contrôle. Ces modalités peuvent être économiques ou non.

Les modalités non-économiques de contrôle sont soit militaires, soit juridiques, soit politiques. Le gouvernement fédéral a sous son contrôle les forces militaires du pays. Celles-ci peuvent être utilisées non pas seulement lors d'agressions externes, mais aussi contre des révoltes internes. Des forces militaires et para-militaires ont souvent été employées par le gouvernement indien lors de cette dernière décennie, par exemple en Assam, au Punjab et au Jammu & Cachemire.

Les deux mécanismes juriduques souvent employés par le gouvernement fédéral pour résoudre les problèmes de partage sont l'amendement constitutionnel et la Cour Suprême. Le premier résout les problèmes de participation et de partage par un accord majoritaire. L'autre est souvent utilisée pour résoudre les problèmes de partage des pouvoirs et de distribution des bénéfices par voie d'interprétation de la constitution ou des statuts en suivant le principe que "le droit fédéral prime le droit particulier".

Souvent, si le parti politique au centre est aussi le parti gouvernant les Etats fédérés, il peut avoir un rôle modérateur. Pour ceci, le parti peut utiliser sa base d'adhérents et de militants pour influencer l'opinion publique.

Pour le contrôle économique, il y a trois instruments : la politique monétaire, le contrôle administratif des prix et la politique fiscale. Dans le fédéralisme, la politique monétaire est sous le contrôle quasi-exclusif du gouvernement fédéral. Il a un droit exclusif de monnayage et le droit quasi-exclusif d'emprunter à l'étranger.

La politique du gouvernement fédéral de soutien à certains secteurs (notamment au secteur agricole) a une influence sur les termes de l'échange entre les secteurs (subventions des travailleurs agricoles). En effet, une garantie des prix à un secteur est une subvention favorisant les Etats fédérés qui sont spécialisés dans cette activité.

Contrairement à la politique monétaire, la politique fiscale est partagée entre les mains des gouvernements fédéral et fédérés. Ce partage de l'instrument réduit son efficacité à influencer le niveau de l'activité économique. Néanmoins, elle est l'instrument principal pour résoudre des problèmes associés à l'intégration fédérale, ceci pour deux raisons : d'une part, parce qu'elle détermine quelles formes d'impôts seront levées (qui paie?) et d'autre part, parce qu'elle détermine les dépenses à faire (qui reçoit?).

Les deux niveaux (fédéral et étatique) ayant le pouvoir de lever des impôts et de dépenser, il en résulte que tous les deux ont le pouvoir de "déficit financing", au moins de facto, si ce n'est de jure. Ceci crée un problème de contrôle du niveau total du déficit.

Pour les Etats fédérés les plus pauvres, les moyens de financement sont rarement équivalents à leurs besoins. Ils demandent un développement économique rapide comme prix de leur intégration au sein de la fédération. Donc, un transfert des ressources des Etats fédérés riches aux Etats fédérés pauvres est nécessaire.

Ceci nous amène à définir le terme "fiscal" et à examiner quelles sont les responsabilités "extra-fiscales" du gouvernement fédéral ainsi que les relations entre la politique fiscale et la politique budgétaire.





4. Maurice CROISAT, Le fédéralisme dans les démocraties contemporaines, Paris, Clefs Politique, Montchrestien, 1995, p. 13-1.

5. Claude-Albert COLLIARD, Institutions des Relations Internationales, Dalloz, Paris, 1974, p.117.

6. Charles LEBEN, A propos de la nature juridique des Communautés Européennes, in Droits n14, 1991, p.62-63. Il cite KELSEN, Thoery of Law and State, Cambridge-Massachusetts, Harvard U. Press, 1949, p.303-327.

7. ibid., p.63.

8. Cours de D.E.A. de Monsieur Philippe BERN sur le Droit douanier, financier et fiscal européen.

9. Charles LEBEN, op. cit., p.69.

10. Raymond GUILLIEN et Jean VINCENT, Lexique des termes juridiques, Dalloz, Paris, 1988.

11. Stéphane RIALS, Destin du fédéralisme, L.G.D.J., Paris, 1986, p. 9.

12. Lexique des termes juridiques, op. cit., 1988.

13. ibid.

14. ibid.

15. ibid.

16. Maurice CROISAT, op. cit., p. 29.

17. Lexique des termes juridiques, op. cit., 1988.

18. Cours de D.E.A. de Monsieur Philippe BERN, op. cit.

19. Stéphane RIALS, op. cit., p. 16.

20. Claude-Albert COLLIARD, op. cit., p. 118 cite Georges SCELLE, Précis de Droit des Gens. Principes et systématique, Sirey, Paris, 1934, et LE FUR, Etat fédéral et confédération d'Etats, Thèse Paris, 1896.

21. Louis DELBEZ, Droit international public, cité par Le Robert, Dictionnaire de la langue française.

22. Claude-Albert COLLIARD, op. cit., cite Georges SCELLE, op. cit.

23. ACIR (Advisory Commission on Intergovernmental Relations), Reflections on Garcia and its implications for federalism, Washington, 1986, p.26.

24. Shubh N. SINGH, Center State Relations in India, H. K. Publishors and Directors, Delhi, 1990, p.79.

25. Lexique de termes juridiques, op. cit., 1988, Législature - Dr. CONST. 1 Durée du mandat d'une assemblée législative. 2 Cette assemblée elle-même. Ce deuxième sens du mot est retenu ici pour distinguer le corps législatif étatique du parlement fédéral. La Constitution canadienne emploie d'ailleurs ce mot dans ce sens.

26. Jean-Pierre LASALLE, La Constitution de 1787 et ses amendements, in Document d'études, Les Institutions des Etats-Unis, (même Editeur), La Documentation Française, Paris, décembre 1989.

27. ACIR, op. cit., février 1986.

28. Shubh N. SINGH, op. cit., p.82, cite A.K.AIYAR, Draft Constitution of India, 1949, p.211.

29. Bora LASKIN'S, (1947), Peace, Order and Good Government, in Federalism in Canada, 1989.

30. Garth STEVENSON, Federalism in Canada, 1989, p.13.

31. David E. ENGDAHL, Constitutional Federalism, Nutshell Series, West Publishing Company, Saint Paul, Minnesota, 1987, pour un examen détaillé des doctrines.

32. Shubh N. SINGH, op. cit., p.76-77.

33. Stéphane RIALS, op. cit., 1986, p.16-17.

34. Olivier BEAUD, op. cit., 1991, p.10 et sa note 1. de bas de page.

35. C-A COLLIARD , op. cit., 1974, p.136.

36. Voir, la notion de "liberté sociale" de J-J ROUSSEAU.

37. Patrick MONAHAN, Politics and the Constitutions : The Charter, Federalism and the Supreme Court of Canada, 1987, p.170 et les notes de renvoi pour d'autres références.

38. David E. ENGDAHL, op. cit., 1987, p. 150, voir Sonzinsky v. U.S., 300 U.S. 506 (1937)

39. Stéphane RIALS, op. cit., 1986, p. 12.

40. THE AUSTRALIAN OVERSEAS INFORMATION SERVICE, L'Australie en Bref, 1991, p.15.

41. Patrick MONAHAN, op. cit., 1987, p.169.

42. Stéphane RIALS, op. cit., 1986, p. 14.

43. Les électeurs sont ceux qui peuvent participer au vote pour les membres de la chambre des représentants.

44. Margaret A. BANKS, Understanding Canada's Constitution, University of Western Ontario, p. 16-24.

45. Voir l'article 91(1) de la Constitution canadienne (abrogé par la loi constitutionnelle de 1982).

46. Avec les chiffres de population actuels, ceci implique qu'au moins sept Provinces, y compris soit le Québec soit l'Ontario, soient d'accord pour la modification.

47. Les niveaux fédérés (de la fédération) comprennent le niveau fédéral, le niveau provincial ou étatique et (parfois) le niveau local.

48. Alexander HAMILTON, John JAY, et Thomas MADISON, The Federalist Papers (1787-1788), 1982.

49. E.J. CHAMBERS, et M.B. PERCY, Natural resources & the Western Canadian Economy, Implications for Constitutional, in From East and West : Regional Views on Reconfederation, C.D. Howe Institute, Toronto, 1991, p.61-62.

50. O. YUL KWON, Saskatchewan : Provincial Public Finances, in Melville McMILLAN ed., Volume I Provincial Public Finances : Provincial Surveys, Canadian Tax Foundation, Toronto, 1991.

51. E.J. CHAMBERS & M.B. PERCY, op. cit., 1991.

52. ibid.

53. ibid.

54. Jean-Claude MARTINEZ et Pierre DI MALTA, Droit fiscal contemporain, Tomes 1 et 2, Litec Droit, Paris, 1986, tome 1 p.138.

Début: INTRODUCTION

CHAPITRE I de l'introduction : LE FEDERALISME

CHAPITRE II de l'introduction : LA FISCALITE

CHAPITRE III de l'introduction : LE FEDERALISME FISCAL

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Copyright 2002 Arvind Ashta, Professor Groupe ESC Dijon-Bourgogne, Visiting Faculty at American Business School, Paris and at the University of Paris 6 (Pierre et Marie Curie)